55% des luxembourgeois trouvent que cela est un problème qu'une seule minorité puisse avoir le droit de vote (Etude PolitMonitor Luxemburger Wort/RTL)
L’élection sans candidat que nous proposons, est une réaction aux écueils de la démocratie représentative telle qu’elle est pratiquée. Certains de ces écueils sont consubstantiels à la représentation, d’autres sont la conséquence d’un détournement de ses principes, enfin il y a les écueils liés à des facteurs exogènes qui en limitent sa portée.
Les écueils consubstantiels :
Le droit de vote limité.
Seuls 26% de la population active du Luxembourg possède le droit de vote. En 1918, le vote censitaire reconnaissait explicitement que les droits démocratiques n’étaient réservés qu’aux groupes les plus riches de la société. A l’époque seul 15% de la population avait accès au droit de vote, soit à peine 11% de moins qu’aujourd’hui.
26% c'est peu, d'autant que sont exclus du vote les jeunes de 16 à 18 ans, qui ne peuvent pas encore voter, ainsi que les personnes vivant dans la grande région, qui vivent l’influence des décisions prises au Grand-Duché de Luxembourg.
En effet, une décision politique a toujours une zone d’effet plus large que le territoire du corps politique qui l’a porté. et qu'à ce titre il nous faut repenser la notion de corps electoral et aller vers ce qui ressemblerait le plus à une démocratie universelle.
Par exemple, la politique du logement en ville a effet sur toute la grande région, de même que la gestion des problématiques liées au transport ou à la politique fiscale sans même parler des impacts que le mode de vie luxembourgeois a sur le climat.
Individualisme démocratique et marketing politique :
La démocratie représentative renforce l’individualisme et accorde la primauté à l’individu dans sa singularité et nie ou minore l’interdépendance des individus. Cet individualisme contribue à un désinvestissement relatif de formes traditionnelles d’action collective auquel est préféré des formes d’engagement plus ponctuels, pragmatique et plus critique à la délégation ou aux logiques de réseaux.
Ainsi on accorde son vote comme on achète un produit ou un service : sur un marché. Ce marché est ainsi le lieu où s’affronte des offres politiques qui doivent trouver acquéreur quoi qu’il en coûte. Le résultat c’est une distance toujours plus grande entre les offres politiques, cout-termistes, et les urgences citoyennes qui nécessite parfois des transformations profondes.
Un exemple illustre bien le décalage qu’il peut exister dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques. Quand on observe les différentes offres politiques qui élaborent sur le sujet, la plupart optent pour du techno-solutionnisme.
Ainsi le véhicule électrique est présenté comme une solution au problème posé par le véhicule thermique alors qu’aujourd’hui le véhicule électrique est essentiellement un véhicule au charbon sans parler du fait qu’il repose sur un accaparement de métaux dont la rareté exclura indéniablement une partie des personnes ayant besoin de mobilité. Ici et/ou ailleurs. Ce techno-solutionnisme permet de s’exonérer des questions politiques liées au transport, à l’aménagement du territoire etc.
Profil sociologique des élus :
La démocratie représentative nécessite des partis politiques pour élaborer une offre politique pour le marché politique et pour choisir selon des règles parfois opaques ceux qui l’incarneront. Les futurs élus sont donc choisis en fonction de leur capacités commerciales, leur capacité à vendre un produit politique sur un marché concurrentiel. C’est ainsi que l’on observe un décalage toujours plus grand entre les caractéristiques sociologiques de la population active et celles des candidat.e.s.
En effet, si on compare Le profil des candidat.e.s et celui des résident.e.s du Luxembourg. Ces dernier.e.s sont plus âgé.e.s, majoritairement masculins (35,78% de femmes contre 50% dans la population), Luxembourgeois.es (85,2% contre 56,96% dans la population), plus actif.ve.s (76,3% contre 63% dans la population), et plus fonctionnaires (28,36% contre 7,17% des salariés au Luxembourg).
Détournement des principes démocratiques :
Evènementiel démocratique
Les citoyen.es sont invités à s’exprimer sur leur préférences politiques une fois tous les six ans ou bien à faire la démarche de s’inscrire sur les listes électorales. À quelques semaines du scrutin l’espace publique est saturé de marketing politique. La politique est donc présentée comme un événement épisodique dont il ne faudrait s’occuper qu’à des moments précis.
Des dispositifs de participation citoyenne existent bien au niveau national (pétition, referendum) ou local (commissions consultatives, plateformes citoyennes) mais soit ils ne fonctionnent pas soit elles ne sont que consultatives dans les deux des cas il s’agit d’un ersatz de démocratie ou Democracywashing.
Nous prônons la mise en place d’une démocratie directe locale issue d’élections sans candidats et qui puisse tout au long de la mandature exercer un pouvoir politique réel. Inspirés par le municipalisme tel que défini par J. Durand Folco ou M. Bookchin, nous souhaitons développer des revendications tout en construisant les fondements d’une société future résiliente.
Electoralisme et clientélisme :
Une des formes de détournement de la démocratie est l’électoralisme et son corollaire le clientélisme. Du fait de la marchandisation démocratique nous observons une tendance à l’électoralisme qui se caractérise par une orientation démagogique consistant à flatter l’électorat et à masquer les aspects désagréables de la réalité.
Cela occasionne le fait que les positions et les programmes sont sur-déterminés par les gains électoraux escomptés mais aussi par la banalisation de formes diverses de clientélismes (octroi d’avantages injustifiés -subventions, obtention d’emplois, facilités diverses- en échange d’un soutien politique futur).
Formalisme démocratique:
Dans certains cas il existe un cadre formellement démocratique mais qui est sous utilisé (commissions consultatives) ou détourné par des pratiques autocratiques. Dans certaines communes, le conseil communal est réduit à être une chambre d’enregistrement des décisions prises de façon non transparente par un bourgmestre qui refuse de jouer le jeu démocratique. Cela existe aussi au parlement (la mise en place du bureau du citoyen pour le climat est un bon exemple).
Facteurs exogènes
Libéralisme économique et démocratie ont des fondements, sinon contradictoires, au moins parfaitement paradoxaux. En effet, le démos est le corps politique d’une cité, soit l’ensemble des citoyens qui constitue le pouvoir souverain d’un État. L’individu est la plus petite unité statistique comptable. Le démos se définit, vit sur un territoire délimité. Le client, lui, évolue là où le marché le porte, il doit franchir les limites.
On assiste à une inflation de textes technico juridiques dont la vocation est de garantir de moins de législation/régulation et donc plus d’inégalités. La mission d’un gouvernement élu est réduite à la gestion de l’État de manière conforme aux critères fixés ailleurs, dans les traités à valeur supranationale. Les conflits sont de plus en plus arbitrés hors du territoire.